La résidence alternée

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La Résidence alternée

Le choix de la résidence des enfants, après une séparation, apparaît comme l’un des points les plus sensibles à organiser. Avec la Loi du 4 mars 2002, la notion de coparentalité a été consacrée. Le mode de résidence alternée instauré par cette Loi peut apparaître comme l’une des expressions les plus achevées de la coparentalité. Cependant les chiffres publiés par le Ministère de la Justice montrent que la part de résidence alternée n’est que d’environ 21% ; elle est rare pour les enfants âgés de moins de 2 ans (moins de 5%), elle dépasse 10% dès l’âge de 2 ans et atteint son maximum pour les enfants qui ont entre 6 et 10 ans ; puis elle diminue légèrement à partir de l’âge de 11 ans et n’est plus que de 15% pour les enfants âgés de 15 à 17 ans

Par Maître Natacha JULLIEN-PALLETIER, Avocat spécialiste en Droit de la Famille, des personnes et de leur patrimoine.

L’hébergement alterné permet aux parents séparés de continuer à exercer ensemble leurs prérogatives, et l’enfant continue à profiter, de façon complémentaire, de chacun de ses deux parents ; ces derniers étant associés l’un et l’autre étroitement dans la vie quotidienne de celui-ci.

Cependant, il faut faire attention à ce que l’intérêt de l’enfant ne s’efface pas derrière la volonté de privilégier coûte que coûte l’égalité des droits des parents. Le Juge, saisi en cas de conflit, ne doit pas s’enfermer dans une vision trop stricte des bienfaits ou des méfaits de la résidence alternée ; il doit apprécier au cas par cas, les conditions et les modalités de la résidence alternée.

Conditions de la résidence alternée

Seul l’intérêt primordial de l’enfant doit être pris en considération pour fixer le mode d’hébergement. Les Juges portent tout d’abord une attention particulière à l’âge de l’enfant qui doit être compatible avec des changements de lieu de vie fréquent. Le souhait de l’enfant, qui possède une capacité de discernement suffisante, peut également être retenu pour fixer ou non l’hébergement alterné. Il est alors entendu par le Juge qui se prononce sur les modalités de sa résidence. Les sentiments exprimés par l’enfant, sans être une obligation pour le Magistrat, peuvent alors être pris en considération.

Des conditions liées aux parents doivent être également appréciées. Le critère de la proximité géographique des domiciles des deux parents est presque systématiquement retenu par les Juges. En effet, la proximité géographique facilite la vie de l’enfant, et notamment ses déplacements vers l’autre domicile parental ainsi que vers son lieu de scolarité. La capacité de chaque parent d’assumer ses responsabilités parentales est aussi un élément important. Cette capacité s’apprécie notamment au regard des qualités éducatives et affectives de chacun des parents, de leur capacité de dialogues sur les évènements concernant la vie de l’enfant. Cependant, certains Juges décident parfois d’une résidence alternée malgré l’existence d’un conflit entre les parents. La disponibilité de chacun des parents est également à apprécier. Chacun des parents doit pouvoir accorder du temps à l’enfant, à ses activités scolaires et extrascolaires ; L’exercice d’une activité professionnelle intense ne constitue pas forcément un élément permettant d’écarter systématiquement la résidence alternée. Les conditions matérielles d’accueil de l’enfant sont également importantes. Une enquête sociale peut alors être ordonnée afin de connaître les conditions d’hébergement offertes par les parents.

Modalités de la résidence alternée

Les modalités de la résidence alternée n’ont pas été fixées par le législateur et sont déterminées librement par les parents ou par le Juge aux Affaires Familiales en cas de désaccord entre eux. Cette résidence alternée ne conduit pas nécessairement à une stricte égalité du temps de présence de l’enfant auprès de chacun des parents. En effet, la Loi n’impose pas que le temps passé par l’enfant auprès des parents soit de même durée. Les parents ou le Juge peuvent décider, si l’intérêt de l’enfant le commande, d’une alternance aboutissant à un partage inégal du temps. Plutôt que la durée de la relation, la qualité de celleci est privilégiée afin que le temps de présence de l’enfant chez chacun des parents soit fixé en fonction des contraintes de chacun d’eux et des données concrètes liées au cas par cas. Cependant, le plus souvent, celle-ci fonctionne de manière hebdomadaire, ou, plus rarement, par quinzaine. Une alternance plus courte qu’hebdomadaire peut être décidée, notamment pour les enfants en bas âge afin d’éviter une période de résidence trop longue de l’enfant chez chacun des parents. En fonction de la situation, l’alternance peut être configurée « sur mesure », pour tenir compte notamment de l’activité professionnelle de chacun des parents, de leur disponibilité, de l’éloignement de leurs domiciles respectifs ou du souci de ne pas compromettre la poursuite de la scolarité de l’enfant.

L’article 373-2-9 du Code Civil prévoit même que le mode de résidence alternée peut être décidé par le Juge de façon provisoire. La résidence alternée est alors fixée pendant une durée délimitée par le Juge aux Affaires Familiales (généralement entre 6 mois et 1 an). Puis au terme de celle-ci, le Juge statue à nouveau, et ce, de façon définitive, sur la résidence de l’enfant en alternance ou non. L’hébergement alterné à titre provisoire peut aussi être décidé dans l’attente d’une mesure d’instruction telle qu’une enquête sociale ou une expertise psychologique de la famille. La mesure provisoire de résidence alternée permet au Juge d’être éclairé sur la mise en œuvre de l’alternance, son déroulement, son efficience, l’intérêt qu’en retire ou non l’enfant et l’intérêt à la poursuivre.

La mise en place d’une résidence alternée doit avant tout satisfaire l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit primer sur l’intérêt personnel des parents. Ce mode d’hébergement est parfois écarté dans certains cas ; notamment lorsque les domiciles respectifs des deux parents sont trop éloignés géographiquement (cet éloignement serait alors source de fatigue pour l’enfant). Les deux parents doivent présenter des qualités éducatives et affectives certaines. Les contraintes professionnelles de l’un de des parents peut aussi rendre impossible la mise en place de la résidence alternée. Le très jeune âge de l’enfant peut également rendre incompatible la fixation d’un hébergement alterné. Ce très jeune enfant ayant un besoin particulièrement important de repères stables et réguliers. De même l’hébergement alterné peut ne pas être fixé lorsque l’enfant manifeste vivement son opposition à celui-ci, et notamment s’agissant d’un adolescent ayant acquis un certain degré d’autonomie. Enfin, le succès du système de la résidence alternée présuppose souvent une relative bonne entente entre les parents, au moins un minimum de coopération. Dans le cas contraire, le mode de résidence alternée peut être imposé par le Juge, au moins à titre provisoire.

Pension alimentaire et résidence alternée

Un parent peut être amené à payer une pension alimentaire à l’autre, même en cas d’alternance. Le mode de résidence alternée implique une prise en charge matérielle de l’enfant partagée par ses deux parents, soit par moitié, soit au prorata de leurs revenus. De plus, en cas de disparité importante des revenus, un parent peut aussi être amené à verser une pension à l’autre parent. Par ailleurs, en cas d’hébergement alterné, et sauf accord contraire des parents, le bénéfice des parts fiscales des enfants est partagé en deux (article 196 du Code Général des Impôts). Le bénéfice des allocations familiales est également partagé par moitié entre les parents, sauf s’ils s’accordent sur la désignation de l’un d’eux comme étant seul allocataire.

Les parents qui sont d’accord, ou le Juge, peuvent mettre fin à la résidence alternée lorsqu’apparaissent des signes de dysfonctionnement. La situation peut ainsi toujours être revue ultérieurement.

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Article publié le 29 OCT 2021 à 08h54 dans la catégorie « Presse ».